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Activisme militaire de Washington en Afrique

Domingo.9 de enero de 2005 2244 visitas Sin comentarios
Le Monde Diplomatique #TITRE

Par Pierre Abramovici
Journaliste. Auteur d’Un rocher bien occupé, Editions du Seuil, Paris, 2001.

Les 23 et 24 mars 2004, les chefs d’état-major de huit pays (Tchad, Mali, Mauritanie, Maroc, Niger, Sénégal, Algérie, Tunisie) ont, pour la première fois, participé à une discrète réunion au siège du commandement européen de l’armée américaine (US-Eucom), à Stuttgart. Présentée comme « sans précédent », la rencontre, dont les travaux sont restés secrets, concernait la « coopération militaire dans la lutte globale contre le terrorisme » ; elle traitait du Sahel, zone tampon entre le Maghreb et l’Afrique noire, entre les zones pétrolières du Nord et celles du golfe de Guinée.

En quelques années, l’intérêt politique et militaire des Etats-Unis pour l’Afrique s’est considérablement accru, comme l’illustrent la visite du secrétaire d’Etat Colin Powell au Gabon et en Angola en septembre 2002 (une heure dans chaque pays !), le voyage du président George W. Bush au Sénégal, au Nigeria, au Botswana, en Ouganda et en Afrique du Sud en juillet 2003, et la tournée du général Charles F. Wald, commandant adjoint de l’Eucom, dans dix pays (Ghana, Algérie, Nigeria, Angola, Afrique du Sud, Namibie, Gabon, Sao-Tomé-et-Principe, Niger et Tunisie), deux semaines avant la réunion de Stuttgart.

Plus significative est la participation indirecte de Washington, au mois de mars 2004, à une opération militaire menée par quatre pays du Sahel (Mali, Tchad, Niger et Algérie) contre le Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC). Le numéro deux de cette organisation, M. Ammari Saïfi, connu sous le nom d’« Abderrazak le para », aurait été arrêté au Tchad en mai (1). Et, en juin, l’armée algérienne a annoncé qu’elle avait abattu Nabil Sahraoui, le principal dirigeant du groupe. Le GSPC est inscrit, comme les Groupes islamistes armés (GIA), sur la liste américaine des organisations terroristes et est soupçonné par Washington d’avoir des liens avec Al-Qaida. Il s’est fait connaître en enlevant trente-deux touristes européens dans le Sahara algérien, au début de l’année 2003.

L’opération marquait une première en Afrique et confirmait l’étroite collaboration des Etats-Unis avec l’Algérie.
Dès le mois de janvier 2004, des moyens considérables ont été déployés par l’armée américaine pour soutenir la lutte des troupes locales contre le GSPC. L’aide a été organisée dans le cadre du programme d’assistance militaire Initiative pan-Sahel (PSI), opérationnel depuis novembre 2003 et doté pour 2004 de 6,5 millions de dollars. Ce programme vise à aider le Mali, le Tchad, le Niger et la Mauritanie à combattre « la contrebande, les criminels internationaux et les mouvements terroristes ».

Quelque 250 tonnes de matériels divers et 350 soldats ont été acheminés dans la région par un pont aérien de deux semaines, à partir de la base aérienne de Rota, en Espagne. Une fois les troupes et le matériel acheminés, des moyens aériens de protection ont été mis à disposition à partir des bases de la Royal Air Force à Mildenhall et Lakenheath, en Grande-Bretagne. La protection de l’opération a également mobilisé des éléments du 32e groupe des opérations spéciales, une unité liée à la CIA. Dans les semaines qui ont précédé l’opération, des éléments du 10e groupe des forces spéciales, basé à Stuttgart, avaient été envoyés pour superviser l’entraînement des troupes maliennes.

« PSI est un outil important de la guerre contre le terrorisme et a beaucoup fait pour renforcer les liens dans une région que nous avions largement ignorée par le passé, et notamment entre l’Algérie et le Mali, le Niger et le Tchad, a expliqué, le 23 mars, le colonel Victor Nelson, responsable de ce programme pour le bureau du secrétariat d’Etat à la défense chargé des questions liées à la sécurité internationale. Nous disons depuis longtemps que, si la pression devient trop dure pour les terroristes en Afghanistan, au Pakistan, en Irak et ailleurs, ils trouveront de nouveaux endroits où travailler, et les régions du Sahel et du Maghreb font partie de ces endroits (2). »

En neuf mois à peine, de la visite du président Bush à la conférence de Stuttgart, l’engagement militaire américain en Afrique s’est nettement accéléré, après une pause durant l’après-guerre froide. Washington a pris conscience de sa dépendance à l’égard de matières premières fournies par le continent : le manganèse (production d’acier), le cobalt et le chrome indispensables pour les alliages (notamment en aéronautique), le vanadium, l’or, l’antimoine, le fluor, le germanium... auxquels il faut évidemment ajouter les diamants industriels. La République démocratique du Congo (ex-Zaïre) et la Zambie possèdent 50 % des réserves mondiales de cobalt ; 98 % des réserves mondiales de chrome se trouvent au Zimbabwe et en Afrique du Sud ; cette dernière concentre en outre 90 % des réserves de métaux du groupe du platine (platine, palladium, rhodium, ruthénium, iridium et osmium). Et la soif de Washington pour le pétrole au début du millénaire accroît l’importance de pays comme l’Angola et le Nigeria.

Après l’échec de l’intervention en Somalie, entamée le 9 décembre 1992 et terminée le 31 mars 1994, le président William Clinton relança la politique africaine de Washington. Ce regain d’intérêt se manifesta avec éclat, du 15 au 18 mars 1999, lorsque les Etats-Unis accueillirent la première rencontre entre les responsables de huit organisations régionales africaines, quatre-vingt-trois ministres du continent et leurs homologues américains. Tenue à Washington, cette réunion avait pour but de « renforcer le partenariat entre les Etats-Unis et l’Afrique » et d’« encourager plus de développement économique, d’échanges commerciaux, d’investissements, de réforme politique et de croissance économique réciproque au XXIe siècle (3) ». Si on évoque le terrorisme en raison des attentats de 1998 contre les ambassades américaines à Nairobi et à Dar es-Salaam attribués à Al-Qaida, la réunion sera surtout suivie de l’adoption de la loi américaine sur la croissance et les possibilités économiques en Afrique (African Growth and Opportunity Act, AGOA), élargissant l’accès des produits africains au marché américain.

Plus discrète est la mise en place progressive d’un système très cohérent d’assistance militaire à partir du milieu des années 1990. En 1996, Washington lance la création d’une Force de réponse aux crises africaines (ACRF). Peu après, celle-ci est remplacée par une structure nommée Initiative de réponse aux crises africaines (African Crisis Response Initiative, ACRI). La mission officielle de l’ACRI est l’entraînement au « maintien de la paix » et à l’« aide humanitaire » ; et les matériels fournis sont de type « non létal ». En réalité, l’ACRI est destinée à moderniser et à adapter aux normes américaines les forces armées locales, notamment face à l’émergence du terrorisme en Afrique. Elle vise aussi, naturellement, à éviter de nouveaux désastres de type somalien.

Opérations clandestines

Bien que l’ACRI soit une création du secrétariat d’Etat américain, c’est le commandement européen de l’armée américaine (US-Eucom) qui en coordonne les moyens militaires, particulièrement le recours aux forces spéciales. Des entreprises privées spécialisées dans le secteur, comme Logicon du groupe Northrop-Grumman ou Military Professionnal Resources Inc. (MPRI), apportent un soutien logistique (fourniture de matériel ou de « personnel civil spécialisé »). MPRI est une firme privée de conseils en matière de sécurité dirigée notamment par d’anciens officiers américains ; elle opère pour le compte de gouvernements du monde entier, y compris en Irak.

Si l’ACRI affiche des objectifs humanitaires, son coordinateur des programmes d’entraînement est le colonel Nestor Pino-Marina, un ancien officier au palmarès évocateur : exilé cubain, il participe au débarquement raté de la baie des Cochons en 1961 ; ancien des forces spéciales, engagé au Vietnam et au Laos, il appartient durant l’ère Reagan à l’Inter-American Defense Board et prend part aux opérations clandestines contre les sandinistes aux côtés de la Contra nicaraguayenne dans les années 1990. Il sera accusé d’avoir participé au trafic de drogue pour financer les expéditions d’armes en Amérique centrale...

Le programme d’entraînement de l’ACRI est conçu pour développer des compétences militaires de base, renforcer des formations de combat et accroître les capacités des états-majors. Le tout, intitulé « mini-équipement, maxi-entraînement », s’articule autour de six « clés »: standardisation, interopérabilité, formation des instructeurs, transparence, soutien, travail d’équipe. Il est même prévu d’étendre les normes d’entraînement à des programmes conduits par d’autres pays comme la France, le Royaume-Uni ou la Belgique et de coopérer avec ces pays.
De juillet 1997 à mai 2000, l’ACRI a organisé la formation de bataillons (entre 800 et 1 000 hommes) au Sénégal, en Ouganda, au Malawi, au Mali, au Ghana, au Bénin et en Côte d’Ivoire ; le département d’Etat fournit à plus de 8 000 hommes des équipements légers (générateurs électriques, véhicules, détecteurs de mines, matériel de vision nocturne...) et surtout des instruments de communication. Ce programme a bénéficié de 30 millions de dollars pour la période 2001-2002.

L’ACRI prolonge une série de programmes d’assistance militaire ou civile ponctuels développés par les Etats-Unis depuis le début des années 1990 et gérés par le secrétariat à la défense. C’est le cas notamment au Mali (voir Le cas du Mali).

De même, en juillet 2001, 400 soldats sénégalais ont suivi, dans le cadre de l’ACRI, une formation à la « guerre psychologique ». Selon le colonel Nestor Pino-Marina, « les doctrines en usage à l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN) ont été absorbées (4) ».

Des séminaires politico-militaires ont également été organisés pour 65 officiers afin de « les préparer aux opérations de maintien de la paix ». L’exercice a culminé avec la simulation informatique, grâce à des moyens satellites, d’une situation de crise. Le programme Janus, base de l’exercice, a été conçu par Logicon. Il s’agit toujours de développer l’intégration et l’opérabilité aux normes en vigueur au Pentagone et d’installer durablement des équipements américains.

Mais l’ACRI n’est qu’une facette de l’engagement militaire grandissant des Etats-Unis en Afrique. Etabli en 1999, le Centre africain d’études stratégiques - African Center for Strategic Studies (ACSS) - est une branche de l’Université nationale de défense du Pentagone. Cette institution académique fournit un enseignement destiné à du personnel militaire de haut niveau, mais aussi à des leaders civils (responsables politiques ou associatifs, chefs d’entreprise, etc.). Les programmes traitent des relations civilo-militaires, de la sécurité nationale, de l’économie de la défense, etc. En mai 2003, le Mali a été choisi pour accueillir un séminaire consacré à la lutte contre le terrorisme dans la région : l’Algérie, le Tchad, le Mali, la Mauritanie, le Maroc, le Niger, le Nigeria et le Sénégal y participaient. La France et l’Allemagne étaient également représentées.

Après les attentats du 11 septembre 2001, les Etats-Unis ont accru leur investissement militaire en Afrique. La « guerre contre le terrorisme » leur fournit les prétextes nécessaires. Lors de sa tournée africaine de juillet 2003, le président Bush l’a affirmé : « Nous ne laisserons pas les terroristes menacer les peuples africains ni utiliser l’Afrique comme base pour menacer le monde (5). »

Quarante-quatre pays concernés

Au printemps 2002, l’administration Bush a ainsi transformé (« réorganisé », dit-on au Pentagone) l’ACRI en Acota (African Contingency Operations Training Assistance). Outre le « maintien de la paix et l’aide humanitaire », l’Acota inclut désormais l’entraînement offensif, notamment pour des unités régulières d’infanterie et de petites unités sur le modèle des forces spéciales, ainsi que la formation à l’environnement « hostile ». Les forces africaines sont désormais dotées de matériel offensif standardisé (fusils d’assaut, mitrailleuses, mortiers, etc.). A Washington, on ne parle plus d’armes « non létales » comme à l’époque de l’ACRI et on insiste sur la coopération « offensive » : « Si les forces déployées dans le cadre de l’ACRI n’ont jamais été mises dans une situation où leur sécurité aurait pu être menacée, en revanche les troupes qui seront engagées dans le cadre de l’Acota, étant donné qu’elles seront chargées d’instaurer le calme, devront être prêtes à faire face au danger (6). »

L’Acota est lié à des centres de formation militaire du Joint Combined Arms Training System (Jcats), qualifiés d’« indispensables », car ils permettent de maintenir le niveau de qualification et de préparation militaire. Le premier a été ouvert à Abuja, au Nigeria, le 25 novembre 2003. Les Jcats sont gérés par MPRI et reposent « sur l’utilisation de logiciels sophistiqués de simulation de guerre qui s’inspirent de conditions qui existent véritablement sur les champs de bataille. (...) Le Nigeria et le Canada sont les deux seuls pays à avoir des logiciels Jcats (7) ».

Selon le colonel Victor Nelson, ancien attaché militaire des Etats-Unis auprès du Nigeria, chargé de l’Initiative pan-Sahel, « c’est un moyen bon marché d’assurer la formation de cadres. Même des pays ayant peu de ressources peuvent avoir recours aux Jcats. Il s’agit en fait de rassembler des gens pendant une quinzaine de jours pour des exercices de guerre, ce que les militaires américains du XXIe siècle font déjà (8) ».

Outre l’Acota, quarante-quatre pays africains participent à un programme spécifique destiné aux officiers : le programme international de formation dans les domaines militaire et de l’éducation (IMET), qui a formé, en 2002, plus de 1 500 officiers. Pour les sept principaux pays concernés (Botswana, Ethiopie, Ghana, Kenya, Nigeria, Sénégal, Afrique du Sud), le coût total de l’IMET est passé de 8 millions de dollars en 2001 à 11 millions en 2003. Enfin, le programme régional de maintien de la paix en Afrique (ARP) inclut un entraînement aux tactiques offensives et le transfert de technologie militaire. De 2001 à 2003, l’ARP a reçu un financement estimé à près de 100 millions de dollars.

La stratégie américaine en Afrique pourrait se résumer à deux axes fondamentaux : d’une part, l’accès illimité aux marchés-clés, aux sources d’énergie et autres ressources stratégiques, et, d’autre part, la sécurisation militaire des voies de communication, notamment pour permettre l’acheminement des matières premières vers les Etats-Unis. « Ce que le peuple américain a retenu de la guerre du Golfe, c’est qu’il est beaucoup plus facile d’aller botter les fesses des gens du Proche-Orient que de faire des sacrifices pour limiter la dépendance de l’Amérique vis-à-vis du pétrole importé », disait déjà M. James Schlesinger, secrétaire d’Etat à l’énergie du président James Carter, lors du quinzième Conseil mondial de l’énergie, en septembre 1992.

C’est évidemment le pétrole africain qui intéresse les Etats-Unis (9). Et, le 5 septembre 2002, M. Colin Powell, en provenance de Johannesburg où il participait au Sommet de la Terre, se rendait à Luanda (Angola) avant de gagner Libreville (Gabon) - deux pays producteurs de pétrole. Les experts s’accordent à dire que, au cours des dix prochaines années, le continent africain deviendra, après le Proche-Orient, la deuxième source de pétrole et éventuellement de gaz naturel des Etats-Unis. Au moins en attendant que « les choses se calment »...

Deux voies stratégiques sont au centre de la pensée militaire américaine : à l’ouest, l’oléoduc Tchad-Cameroun, à l’est, l’oléoduc Higleig - Port-Soudan. Et l’on parle d’un projet d’oléoduc reliant le Tchad au Soudan.
En juillet 2003, une tentative de coup d’Etat à Sao-Tomé-et-Principe, petit Etat très riche en réserves de pétrole associé au Nigeria, a précipité l’intervention de Washington dans l’archipel. A peine trois mois plus tard, des compagnies pétrolières, essentiellement américaines, ont offert plus de 500 millions de dollars pour explorer les eaux profondes du golfe de Guinée, que partagent le Nigeria, la Guinée-Equatoriale et Sao-Tomé-et-Principe. Soit le double de ce que les trois pays espéraient obtenir.

Dans la foulée, l’armée américaine a annoncé un programme d’aide aux petites forces de sécurité locales. L’installation d’une base militaire serait envisagée. Le Congrès américain et l’administration Bush ont formellement déclaré cette région d’« intérêt vital » pour les Etats-Unis. Washington, à travers le département d’Etat et le département à la défense, a très bien préparé le terrain : le général Carlton W. Fulford, commandant en chef de l’Eucom, s’est rendu à Sao-Tomé en octobre 2002 pour étudier la possibilité d’établir un mandat régional en Afrique de l’Ouest, et MPRI forme les gardes-côtes de Guinée et d’Angola.

Concurrence avec les anciens colonisateurs

Les Etats-Unis, sur le continent noir, cherchent à obtenir des partenariats avec tous les pays, sous les prétextes les plus divers. Ainsi les Américains affirment-ils que l’armée sud-africaine serait incapable de mener une action d’ampleur, une part « significative » de ses effectifs étant, selon eux, infectés par le VIH. Pretoria aurait donc besoin d’un soutien massif de Washington pour renforcer ces éléments défaillants. C’est ainsi que l’Afrique du Sud s’apprête à rejoindre le programme Acota. Curieusement, tous les soldats sud-africains ne doivent pas être malades, puisque des milliers d’entre eux sont employés en Irak comme « supplétifs civils » par des sociétés privées.
En réalité, l’Afrique du Sud intéresse les Etats-Unis en raison de sa position stratégique. Durant la guerre froide, Pretoria avait ouvert ses bases aux forces armées américaines, permettant ainsi à Washington de contrôler l’océan Indien entre l’Afrique et la base navale de Diego Garcia. C’était aussi une pièce indispensable dans la lutte contre les mouvements de libération africains suspectés d’être inféodés à Moscou. En 2001, l’ambassadeur des Etats-Unis Cameron Hume affirmait que les Sud-Africains et les Américains « partageaient un attachement semblable à la démocratie, à l’économie de marché, et à la recherche d’un avenir meilleur pour tous (10) ».

L’interventionnisme militaire des Etats-Unis en Afrique empiète naturellement sur les zones d’influence traditionnelles des anciennes puissances coloniales, notamment la France. Cette concurrence est évidente à Djibouti, l’un des pays les plus pauvres de la planète, désertique et sans ressources. Un pays a priori sans intérêt... sauf par sa situation stratégique. Il s’agit en effet à la fois d’une position avancée sur une zone maritime où transite le quart de la production mondiale de pétrole (sans compter la proximité géographique de l’oléoduc soudanais) et qui se trouve aussi bien située sur la bande stratégique Sahel - corne de l’Afrique, que Washington s’emploie à « sécuriser ». Si la France y maintient sa principale base militaire à l’étranger, Camp Lemonnier, Djibouti est devenu une base américaine permanente (11).

Commandant en second de l’Eucom, le général Charles F. Wald passe beaucoup de temps en Afrique. En mars 2004, il s’est rendu dans onze pays en une semaine (Maroc, Algérie, Nigeria, Angola, Afrique du Sud, Namibie, Gabon, Sao-Tomé, Ghana, Niger et Tunisie). Après avoir, au cours d’une conférence de presse organisée à Washington pour les journalistes africains, souligné que les Etats-Unis et la France avaient de nombreux intérêts en commun, le général Wald a indiqué : « Il y a des pays francophones qui ont des liens anciens et historiques avec la France. (...) Les Français pourraient être impliqués dans ce cadre (12). »

Une façon à peine élégante de répartir les tâches et d’asseoir la présence politique de Washington en Afrique.